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Love baby love… Ce petit flocon de puppy représente tout l’amour, l’émerveillement et la tendresse que j’éprouve pour la vie, la nature. C’est à la fois vulnérable et plein de puissance. J’ai permis ta venue, je m’engage, comme avec tous les chiens qui nous avons accueillis, à honorer et respecter ce que tu es, à te protéger et voir à tes besoins jusqu’au dernier jour, au mieux de mon coeur. Love baby love.
Le 28 mai dernier, CBC DOCUMENTARY CHANNEL PREMIERE, a diffusé le documentaire de Fern Levitt sur les pratiques du monde du traîneau à chiens Sled dogs Film. Je n’ai pas vu le film, mais j’ai une bonne idée de son propos, la bande-annonce était très claire. Ce film a fait fortement réagir la communauté du mushing plus tôt cette année dans l’ouest du pays parce qu’il m’est en relief des pratiques discutables sans le traîneau à chiens. Je suis propriétaire d’un ranch canin ou nous offrons des randonnées et des formations de traîneau à chiens et un service de pension et j’aimerais apporter mon point de vue.
D’entrer de jeux, pour moi, avoir des animaux est une grande responsabilité. Les animaux, les chiens sont des êtres sensibles et capables d’émotions, ce sont mes égaux. Bien sûr nous ne sommes pas pourvus des mêmes attributs qu’eux et nos besoins physiologiques et affectifs ne sont pas les mêmes. À mon avis, la seule bonne raison de nos jours pour faire du traîneau, c’est de le faire pour répondre aux besoins de ces chiens.
Je constate que tout la plupart des gens pensent bien faire, mais visiblement, il y’a un problème, puisqu’au Québec, entre autres, nous avons une des pires situations en occident en regard au traitement des chiens, donc une remise en question n’est pas un luxe.
Quand j’entends la réaction de la communauté des mushers au film affirmé que de garder des chiens attachés c’est bon pour les chiens, que ce ne sont sont pas des chiens domestiques et que c’est la meilleure façon de garder ces chiens pour leur bien-être, ça me désole.
Pourquoi Garder des Chiens de Traineaux à la Chaîne?
John Schandelmeier a écrit dernièrement un texte qui résume le point de vue des mushers « traditionnel » Bien que je ne partage pas son point de vue, ses arguments, il faut apprécier et applaudir le fait que contrairement à beaucoup d’autres mushers, il prend la parole publiquement et respectueusement.
On y lit ces arguments :
« People get up in arms about sled dogs being tethered, but tethered dogs get to interact with each other. Dogs kept in kennels do not. Kennels are jail cells. Groups of dogs kept in yards without constant monitoring have a high likelihood of fight injuries or even deaths. »
Cette affirmation laisse à croire qu’il n’existe qu’une seule façon d’utiliser les enclos, soit un seul chien dans un enclos sans jamais en sortir. Il peut pourtant avoir plus d’un chien par enclos, les enclos peuvent être construits de toute sorte de grandeur. Je suis d’accord, les chiens doivent avoir accès à des activités en quantité et en qualité suffisante, la chaîne ne permet pas plus d’activité ou d’interaction. (Se toucher le jour du nez n’est pas une interaction.)
Évidemment, laisser des chiens sans surveillance, que ce soit en enclos ou à la chaîne, ce n’est jamais une bonne idée. Toutefois, s’il y a à craindre de blessures ou de bagarres, cela ne révèle-t-il pas un problème de socialisation, d’éducation, d’encadrement, de stress, de gestion de l’environnement? Nous avons 33 chiens et nous utilisons les enclos et les parcs à chiens, et nous avons eu 1 incident, et c’est moi qui a été négligent. Socialiser, éduquer, gérer les interactions, oui ça implique beaucoup de temps en plus, mais n’est-ce pas là le plaisir d’avoir des chiens?
À propos des conditions de vie des chiens de maison:
« The owner puts his dog in an airline kennel and goes to work. Some owners get to come home at lunch. They let the dog out for a few minutes then head back to work. The lucky dog gets a 15-minute walk on a leash after work — much like a prisoner getting his time in the exercise yard. »
Il ne fait pas de doute, que la situation des chiens dits « domestique est aussi inquiétant, toutefois, nous sommes capables de marcher et marcher de la gomme en même temps. Le film soulève une problématique, détourner l’attention n’est en rien un argument. La situation des chiens domestiques est un autre débat, tout aussi important, mais n’apporte rien à la discussion des chiens à la chaîne.
À propos des décès à la course de l’Iditarod il écrit:
« Roughly 1,100 dogs participated in this year’s race. Five died. By comparison, 25,000 dogs landed in Minneapolis/St.Paul shelters this past year and 1,300 were euthanized, according to the Humane Society of Minnesota. »
Encore une fois, tenter de mêler deux situations, aussi importante soit-elle n’est pas un argument. D’autant plus que quant à sortir des chiffres, il serait intéressant de faire le décompte du nombre de chiens de traineau produits pour sélectionner seulement les meilleurs et de s’informer sur ce que sont devenus les chiens qui n’ont pas fait l’équipe.
Les chiens de traineau, des animaux de fermes.
« Sled dogs are not your average house pet. In terms of care and value, they are more similar to a dairy farmer’s herd. »
L’humanité a utilisé les animaux depuis longtemps pour sa survie. Il n’est pas exagéré d’affirmer que les chiens de traîneau ont sauvé des vies, les livres d’histoire sont là pour en témoigner. En 2017, toutefois, il ne reste bien peu de tâches accomplies par des animaux qui ont un impact sur notre survie. De nos jours, si ont fait du traîneau à chiens, c’est pour le sport, le plaisir et non pas pour survivre. La réflexion en cours à propos des chiens de traineaux est similaire à celle en cours et à venir sur les fermes laitières et autres élevages d’animaux. À ce jour, notre rapport aux animaux en a été un de survie, et il est compréhensible que dans ce contexte, on ait vu les animaux essentiellement comme des outils, des objets des produits disponibles à nous pour notre survie. Et c’est ce qui explique peut-être pourquoi beaucoup de mushers garde leurs chiens la chaîne, ils auront appris cette façon de faire de leurs prédécesseurs, qui eux vivaient avec des chiens dans un contexte de survivance.
Les vraies questions à se poser sont d’ordre philosophique et éthique: maintenant que notre survie ne dépend plus des animaux, comment justifier de leur imposer nos volontés? Comment justifier la reproduction à notre seul bénéfice? Ce film, que l’on soit d’accord ou non avec la façon qu’il a été fait, qu’il présente un point de vue biaisé ou non, permet de réfléchir sur le futur de notre cohabitation avec les animaux. De la même manière, on nous que nous avons à réfléchir sur l’usage du pétrole et les impacts sur la nature, notre santé.
Je comprends l’intérêt du gardien des chiens à les garder des chiens à la chaîne. Je vois l’intérêt du gardien des chiens, mais je ne vois pas l’intérêt des chiens. Quel être vivant peut s’épanouir à vivre attaché? Quel être vivant a besoin d’être attaché? Avoir un trait génétique spécifique (la course pour les chiens de traîneau, l’odorat pour les chiens de chasse, la prédation pour les chiens gardiens de troupeau) ne prédispose en rien un chien à être attaché à une chaîne de façon permanente. Bien sûr le chien est en mesure de se conditionner a à peu près n’importe quel environnement, c’est à la fois sa force et sa faiblesse. Et c’est peut-être ce qui amène certains à penser que les chiens finalement sont peut-être heureux attaché.
Les Bénéfices des Enclos et Parcs à Chiens
Selon mes expériences, je ne vois que des bénéfices à garder mes chiens en enclos vs la chaîne: je perçois moins de stress, moins d’interaction négative entre les chiens, pas de bagarres, moins de gaspillage d’énergie, des interactions plus agréables, des chiens qui collaborent mieux, qui sont plus concentrés, plus reposés, plus calmes. On élimine aussi toute tension et compression que créer la chaîne sur le cou chien, qui ne peuvent être sans effet. Plus il y a de stress, plus il y a de risques de blessures, qui demande du temps et de l’argent, plus il y de dépense d’énergie inutile coûteuse (nourriture).
D’un point de vue strictement de gestion, oui les chiens en enclos c’est une organisation plus complexe, qui demande plus de temps et plus d’investissement au départ que de garder les chiens en chaînes. Toutefois avec une bonne organisation du travail, une bonne planification, on sort gagnant avec des enclos et des parcs à chiens, tant d’un point de vue organisationnel, financiers et surtout du point de vue de notre relation avec la nature, les chiens.
C’est mon choix d’avoir des chiens, c’est aussi ma responsabilité, d’en prendre soin, de répondre à leurs besoins avant les miens, parce qu’eux n’ont pas eu de choix. De mon point de vue, quelqu’un qui n’a pas le temps la patience et l’argent que ça nécessite devrait s’abstenir d’avoir des animaux.
Les Changements: Dangers ou Opportunités?
Toutefois, il faut admettre que la proposition d’interdire l’attache à la chaîne des chiens de traîneau et exiger l’utilisation d’enclos et de parcs à chiens, comme le demande plusieurs groupes de pression pour le bien-être animal, sera un défi très important d’un point de vue financier et organisationnel pour les chenils concernés et peut mener à des situations difficiles pour les chiens que l’on veut protéger. Qu’adviendrait-il des chiens de chenils qui pour une raison ou une autre ne pourront faire la transition de la chaîne aux enclos? Certains groupes de pression parlent de plusieurs milliers de chiens dans cette situation. Qui s’occupera de ces chiens? Qui payera la note? Comment les groupes de pression qui exigent ce changement envisagent-ils la transition.
Je suis de ceux qui choisissent de voir les changements comme des opportunités, mais pour beaucoup, d’entre nous le changement c’est menaçant et on voit surtout les problèmes potentiels. Une condition de réussite d’une gestion de changements, c’est d’identifier les irritants, les obstacles et proposer des solutions.
Il y a bien des propriétaires de chenils qui sont de bonne foi, et qui auront de la difficulté à s’adapter financièrement à construire des enclos, pourquoi ne pas les aider à trouver des solutions? Pourquoi ne pas leur accorder une période d’adaptation? Cela s’est fait dans d’autres situations avec des enjeux autrement plus sensibles et avec des impacts sur le vivant tout aussi important. Sinon, c’est la collectivité et les refuges qui risquent de se retrouver avec la responsabilité sur les bras.
Discutons avec Coeur et Ouverture d’Esprit
Être en désaccord et discuter, c’est faire preuve d’ouverture, de curiosité, d’intérêt et permet à tous d’évoluer dans le sens du bien-être de tous dans la relation homme-chien. Ignorer ou nier c’est allé dans le sens contraire. La discussion est entamée, c’est le temps de voir comment ont peu collectivement faire mieux.
De toute façon, être en affaires avec des animaux et ne pas offrir les meilleures conditions de vie et les meilleures pratiques possible, bien que cela porte à interprétation, c’est se tirer dans le pied. La clientèle est de plus en plus sensible aux soins des animaux et récompensera ceux qui vont dans le sens du bien-être animal et ça ne changera pas, qui peut être contre la vertu?
Pour moi ce film est une opportunité pour la communauté du mushing de reprendre le contrôle de son sport avant que l’état ne le fasse. C’est une occasion de se projeter comme leader en la matière et non comme agresseur et surtout pas comme un spectateur silencieux.
Respectons la Vie, Respectons-Nous
L’opinion publique ne se laissera jamais convaincre qu’un chien attaché toute sa vie 24h sur 24h 7 jours sur 7 est bon pour lui, mais comprend que c’est plus facile pour le propriétaire. Et entre le confort du propriétaire et celui du chien, que choisira-t-il?
J’entends et lis beaucoup de mécontentement de la population au sujet de la maltraitance animale. J’entends et lis beaucoup du mécontentement dans le monde du chien au sujet de la réglementation des dernières années. L’immense majorité des gens a compris que des animaux maltraités, mal nourris, mal entraînés, mal éduqués ne donnent rien de bon. C’est le temps de démontrer que le monde du traîneau à chiens est prêt à évoluer.
Ce film est une occasion de se remettre en question, c’est le moment de saisir une opportunité de faire ressortir le meilleur de nous même. C’est le moment de discuter, d’apprendre des uns des autres. C’est le moment d’utiliser des faits comme arguments dans nos débats et non la médisance et le dénigrement.
Je n’ai aucunement la prétention d’être parfait, bien au contraire, je me perçois toujours comme un junior malgré mon expérience et mes formations et je cherche constamment à me remettre en question, à améliorer mes connaissances. Il y’a tant de choses à modifier, à améliorer dans nos façons de faire, dans nos installations. À cet effet, nous nous sommes dotés d’un code d’éthique, que nous serions heureux de voir améliorer tout en espérant en inspirer d’autres, à nous challenger, à nous faire évoluer. Le code d’éthique est affiché, ce qui nous aide à faire en sorte que tous peuvent voir que nos paroles sont suivies d’actions.
Je fais de mon mieux, j’ai un esprit ouvert, mon coeur et mes intentions sont purs, alors je n’ai peur de rien. En tant que algonquin, le traîneau à chiens et l’amour de la nature coulent dans mes veines. C’est l’art de vivre de mes ancêtres. Le traîneau à chiens, c’est bon pour mes chiens, pour mes visiteurs, pour moi. Ça permet un regard, une compréhension de la nature, ça permet de se rapprocher de la nature, de sa propre nature, c’est contribue à faire de nous tous de meilleurs humains. C’est ma vie, mon art de vivre et je vais défendre cet art de vivre. Mais pour ça il faut respecter et aimer la vie et ça, ça peut vouloir dire d’accepter de faire autrement.
Nous sommes tous des mammifères, nous respirons le même air, buvons la même eau, respectons la vie, respectons-nous.
Humblement,
Maxime Leclerc-Gingras
Manitou Mushers

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Attribution d’image
Denis A. Jeanneret, Manitou Mushers
Maxime Leclerc-Gingras
Max responded to the call of the Algonquin forest and culture 15 years ago, which brought him into the world of dog sledding and working with different kennels.
Quickly, he is faced with a dilemma: it is so pleasant to explore nature with dogs, but, what about dogs? He is interested in the study of the place of man and nature and the questions of ethics in the dog-man relationship.
Since then, with his wife and associate Anne-Marie Charest, Max has been experimenting with the principles of yoga applied to dogs: non-violence, stress reduction as a tool for the management of the human-dog relationship, and dog training in harnessed canine sports. Maxime lives with his 33 dogs in a friendly environment with no neighbors.
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